Pétrole : quand un effet de ciseau vient couper les prix du baril
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Le cours du baril de Brent en baisse de 35,11% sur un an
L'année 2020 a été marquée par un affaiblissement de la moyenne des cours de Brent de -35,11% par rapport à 2019. En termes de cotation moyenne, le prix du baril est passé de 64,34$ en 2019 à 41,75$ en 2020. En outre, en avril 2020, le prix du baril a atteint son plus bas niveau depuis juin 1999 avec une moyenne inférieure à -74,2% sur un an pour 2019 et une cotation moyenne du baril de Brent de 18,38$.
L'érosion du prix du baril de pétrole s'est traduite en France par un décrochage des prix de vente des carburants. En effet, selon les chiffres du Ministère de la Transition Écologique, les prix de vente HT moyen du sans plomb 95 et du sans plomb 98 ont enregistré une diminution respective de -25,49% et de -20,32% sur un an entre 2019 et 2020. Au total, la consommation de carburants routiers en 2020 a diminué de -15% par rapport à 2019. A cela s'ajoute une diminution annuelle de la consommation de fioul domestique de -1,5% par rapport à 2019.
Bras de fer et guerre des prix entre l'Arabie Saoudite et la Russie
Afin de comprendre les raisons d'un tel recul des prix au cours de l'année 2020 il convient de revenir sur l'un des événements géopolitiques les plus marquants de l'année : l'échec des négociations entre la Fédération de Russie et l'Arabie Saoudite ayant pour but de diminuer la production pétrolière.
En réaction au choc de demande négatif dû à la crise de la Covid-19, une réunion des 13 pays membres de l'OPEP ainsi que 9 autres pays producteurs de pétrole formant l'OPEP + a lieu le 6 mars 2020. Les négociations portent sur la façon de pallier la réduction de la demande globale et la baisse du prix du baril. L'OPEP, menée de facto par l'Arabie Saoudite, propose de réduire conjointement la production pétrolière de 1,5 million de barils par jour jusqu'à la fin 2020. Une proposition que la Russie refuse afin de ne pas perdre de part de marché vis-à-vis des producteurs de schiste américains et considérant que le prix du baril était suffisamment élevé pour ses prévisions budgétaires.
Face à ce désaccord, l'Arabie Saoudite annonce la plus forte baisse de prix en vingt ans ainsi qu'une augmentation de sa production de 25% pour avril et provoque un choc d'offre historique. Par conséquent, dès mars le cours de l'or noir s'effondre de -42,4% par rapport à février. Mais c'est bien en avril que l'effondrement des prix est le plus notable : la cotation moyenne du baril diminue une seconde fois de -42,6% par rapport à mars et atteint les 18,38$.
Ce revirement stratégique de l'Arabie Saoudite consiste ainsi non plus à maintenir un niveau de prix élevé mais à défendre sa part de marché et ce au détriment de la Russie mais également des Etats-Unis. En effet, les décisions prises par les deux Etats ont eu pour effet de déstabiliser le premier producteur de pétrole au monde. La surproduction de pétrole a causé la saturation des capacités de stockages américaines et a fait passer pour la première fois le cours du baril de WTI sur le marché à terme en négatif à -37,63$ pour mai 2020.
Cette situation n'est supportable sur le long terme pour aucun pays producteur et c'est la raison pour laquelle dès avril 2020 un accord de sortie de crise est négocié au sein du triumvirat Etats-Unis, Russie et Arabie Saoudite afin de diminuer la production pétrolière. Le cours du Brent repart à la hausse en mai 2020 avec une augmentation de +59,9% du prix du baril. Cela étant, les deux chocs ont mis à mal l'ensemble des producteurs de pétrole et notamment américains avec plusieurs pétroliers déclarés en faillite. Les conséquences à long terme pour le secteur de cet effet ciseaux restent à être évaluées.