Une crise sans précédent dans le secteur des matières plastiques

Les raisons de cette crise des matières plastiques

L'origine de la situation provient de la crise sanitaire et des confinements qui ont suivis durant l'année 2020. Ces derniers, qui ont eu de multiples effets, ont notamment provoqué une chute de la demande mondiale en matières plastiques. Certains producteurs possédant un volume de stock élevé ont ainsi décidé de réduire leur production. La crise sanitaire a également désorganisé les chaînes logistiques suite à la fermeture de certains sites de production et à la déstabilisation du commerce mondial. Cela a directement impacté les coûts et les délais de transports qui ont, à leur tour, provoqué des annulations de livraisons. Ces problèmes d'approvisionnement concernent les principales résines plastiques vierges, le polypropylène (PP) et le polyéthylène (PE) dont les prix ont progressé de 30% entre mai 2020 et février 2021 ainsi que l'acrylonitrile butadiène styrène (ABS) qui a connu une augmentation du prix de plus de 60% en un an. Cette hausse se retrouve également sur les polyoléfines avec une augmentation pour le sixième mois consécutif.

Les marchés européens sont les plus impactés par la pénurie des matières plastiques en raison de la forte reprise qui a actuellement eu lieu en Asie. En effet, déconfiné plus tôt que le reste du monde, le continent asiatique a fini par créer un déséquilibre important en entraînant un rebond imprévu de la demande de polymères. En conséquence de quoi, les flux de matériaux ont été massivement réorientés vers le marché asiatique à défaut du marché européen. Le début de reprise des entreprises européennes se retrouve donc confronté à cette demande massive provenant d'Asie. De ce fait, de nombreux marchés atteignent des niveaux de commandes particulièrement élevés et ce d'autant plus qu'il s'agit de rattraper l'effet retard lié à la Covid-19 et à ses conséquences durant l'année 2020.

L'ensemble de cette crise se trouve accentué par des chocs exogènes. D'une part, une vague de froid intense s'est abattue sur le Golfe du Mexique durant la deuxième semaine de février alors que ce dernier représente un emplacement clé pour le secteur de la pétrochimie américaine. En effet, l'on trouve de nombreux sites de production de matières plastiques dans cette région. Mais ces derniers n'ont pas été conçus pour résister au froid extrême et certaines canalisations ont été endommagées par les intempéries. Ces dégâts ont provoqué une forte diminution de la production américaine et compromis les exportations de certaines matières plastiques vers l'Europe. D'autre part, le fameux blocage du Canal de Suez par un porte-conteneur à la fin du mois de mars a accentué le retard des importations de PE en provenance du Moyen-Orient. Enfin, la saison des maintenances en Asie qui a commencé s'étale de l'hiver au printemps 2021. Elle doit également débuter en Europe dès le printemps. Ces maintenances impliquent une baisse voire un arrêt de la production de plusieurs sites et accentuent la crise des matières plastiques.

Quelles sont les solutions potentielles et les conséquences pour les secteurs liés ?

Pour le moment, les syndicats professionnels (Elipso et Polyvia) appellent à la solidarité des fabricants de polymère en leur demandant d'être le plus transparent possible. En effet, la déstabilisation des marchés ne doit pas être amplifiée par des acteurs soucieux d'augmenter leurs marges. Les fabricants quant à eux demandent à avoir le plus de visibilité possible sur les futures commandes afin de s'organiser au mieux. Les clients, de leur côté, semblent avoir tendance à resserrer leurs gammes d'emballages afin de se concentrer sur les produits phares. Si ce comportement venait à se généraliser cela pourrait fluidifier la reprise. Une montée en puissance de la production asiatique est également à prévoir dès la fin de la saison des maintenances.

Cette crise, dont la sortie est difficilement prévisible, pourrait avoir des conséquences à moyen et long terme. En effet, certaines matières plastiques sont utilisées sous des formes transformées dans le secteur du BTP et la crise risquerait notamment d'impacter le plan " France relance ". Dans un autre domaine, cette pénurie de matières plastiques force également l'arrêt du travail de recherche et de tests qui sont réalisés sur des matériaux alternatifs plus respectueux de l'environnement car ces derniers ne sont pas fabriqués actuellement.

Article rédigé avec la collaboration d'Anatole Bouvier D'Yvoire