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    La startup du mois : Seair

    06 July 2020
    Cette lettre est réalisée par : Denis Kientz
    , Stéphane Chen
    , Pierre-louis Passalacqua

    Créée en avril 2016, Seair conçoit des " hydrofoils " pour ses propres bateaux ou pour ceux d'autres constructeurs. Les hydrofoils ou foils sont des pièces situées sous les coques des bateaux qui permettent aux embarcations de s'élever légèrement au-dessus de l'eau. Selon ses dirigeants, les foilers, ces bateaux volants, sont l'avenir du nautisme.

    Du voilier de compétition au bateau à moteur

    Les premiers bateaux dotés d'ailerons ou d'autres appendices ayant pour vocation de les " sortir " de l'eau ont été imaginés à la fin du XIXème siècle par le Comte de Lambert et Enrico Forlanini qui sont considérés comme les précurseurs du concept de l'hydroptère.

    Mais pour rendre accessible une technologie, il faut d'abord la rendre visible. Seair a donc commencé à équiper de foils les grands multicoques pour des compétitions emblématiques telles que la Route du rhum ou le Vendée globe. Dès 2018, elle présente un semi-rigide équipé de foils ce qui rend l'embarcation moins gourmande en carburant mais aussi plus confortable, car elle ne reçoit plus les chocs de l'eau qui frappent contre la coque.

    Réconcilier le nautisme de masse et l'écologie

    Les dirigeants de Seair ne sont donc pas des inventeurs mais l'entreprise ambitionne plutôt d'être celle qui va démocratiser le bateau volant pour tous. Son dirigeant, Bertrand Castelnérac, déclarait en 2018 que " les bateaux volants seront demain pour tout le monde, à commencer par les bateaux à moteurs, qui consommeront moins en n'allant plus taper dans les vagues ".

    Richard Forest, ingénieur en aéronautique, et Bertrand Castelnérac, sportif de haut niveau en course au large, se sont associés pour faire du foiler le fer de lance d'un nouveau nautisme, plus écologique et moins élitiste. Après les premières démonstrations dans le nautisme de compétition, ils se sont rapprochés de constructeurs qui visent des marchés à plus grande échelle.

    C'est ainsi qu'est présenté, en juillet 2017, le premier Zodiac semi-rigide doté de foils rétractables et réglables. Les essais sont très concluants avec une baisse de la consommation de carburant de 25 à 30% et une conduite beaucoup plus souple. Mais le marché de masse est encore loin d'être atteint avec un surcoût d'environ 18 000 euros pour l'option " foil ".

    Après ce premier coup d'essai, Seair, aux côtés de l'agence DEMS Sarrazin Design et du fabricant de motorisation Noval, réitère en s'associant avec Bénéteau, leader mondial du nautisme. En février 2019, une vidéo mise en ligne par le groupe Bénéteau montre un bateau à moteur foiler lancé à très haute vitesse, avec des passagers sanglés dans leurs sièges baquets. Seair se présente aujourd'hui en tant qu'équipementier pour permettre à des constructeurs de bateaux, surtout à moteur, de proposer une " option vol ".

    Le marché du nautisme, un secteur clé pour la France

    Selon les chiffres du Ministère de la transition écologique et solidaire, il y a aujourd'hui 13 millions de plaisanciers en France et les immatriculations de bateaux de plaisance ont augmenté de 12 200 unités en 2018. Et selon la Fédération des Industries Nautiques, le secteur compte 5 532 entreprises pour 42 930 salariés. Il génère un chiffre d'affaires de plus de 5 milliards d'euros pour une production de plus de 48 000 unités en 2018. Les voiliers (4 554 unités) et les bateaux à moteurs (11 069 unités) représentent un tiers de la production française et 1,2 milliard d'euros dont plus de 76% à l'export. La France est le second pays fabricant au monde et le premier en Europe.

    Certes, nous sommes loin des 2,2 millions de voitures neuves vendues en 2019, des 400 000 salariés et des 155 milliards d'euros générés par le secteur automobile, il n'en reste pas moins que le secteur du nautisme est un fleuron de l'industrie française. Il apporte un prestige et une démonstration de la compétence des nombreux chantiers navals et des sous-traitants répartis principalement sur le grand ouest et le sud de la France.

    La confiance des investisseurs et la solidarité en plus

    Afin d'être crédible industriellement, Seair a commencé son activité sur ses fonds propres, puis s'est tourné vers des investisseurs. Peu médiatisée sur le plan financier, elle reconnait tout de même avoir obtenu plusieurs apports importants, avec, en 2016, une première levée de fonds de 700 000 euros, suivie d'une seconde tranche de 400 000 euros en mai 2017 puis enfin d'une troisième d'encore 400 000 euros supplémentaires en novembre 2017. En 2018, elle obtient encore deux nouvelles levées de fonds d'un million d'euros. Elle devrait encore obtenir une dernière levée de fonds prochainement, ce qui démontre la confiance que lui portent ses partenaires financiers.

    Elle est également reconnue par l'industrie puisqu'en 2017, Seair était récompensée du Prix de l'innovation 2017 pour son semi-rigide volant. La même année, l'entreprise reçoit, à l'occasion du 8ème Gala de l'Union Internationale Motonautique, la mention spéciale du jury " Environmental Benefit ".

    Et pour preuve que l'entreprise ne vise pas que la croissance et la reconnaissance, lors de la crise sanitaire liée au Covid-19, elle a produit, aux côtés de quelques autres petites entreprises bretonnes, grâce à leurs parcs d'imprimantes 3D, des visières pour les personnels de santé.

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