Social, finance, fiscalité, économie, réglementation, vie des affaires, information sectorielle…
interrogez les 200 experts SVP sur toutes vos questions professionnelles

    Le renforcement des obligations comptables du CE : partie 2

    24 June 2014
    Cette lettre est réalisée par : Amélie Ghesquiere, Marie-clotilde Lefebvre, Véronique Baroggi

    Second rendez-vous concernant le renforcement des obligations comptables du comité d'entreprise. Après avoir présenté le contexte de la réforme ainsi que ses principaux impacts sur le quotidien du CE, voici les mesures de la loi destinées à rendre accessibles et compréhensibles aux salariés les comptes de leur CE, selon des modalités encadrées et contrôlables. L'entrée en vigueur de ces dispositions est également prévue, sauf exception, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2015.

    Un encadrement plus strict des règles comptables...

    Le comité d'entreprise devra désigner un trésorier parmi ses membres (L2325?1 CT). Cette désignation devient obligatoire, mais en pratique de nombreux CE se sont déjà dotés d'un trésorier, ayant notamment pour charge l'élaboration du compte rendu annuel (R2323-37 CT). Le trésorier, outre la supervision de la comptabilité désormais obligatoire, aura également pour mission de présenter un rapport aux membres du CE sur les conventions passées " directement, indirectement ou par personne interposée ", entre le CE et l'un de ses membres (L2325-51 CT), lors de la réunion d'approbation des comptes.

    L'adoption par le CE d'un règlement intérieur (RI) est déjà prévue par les textes (L2325-2 CT). Toutefois, en pratique, peu de CE ont élaboré un tel document. Son adoption était considérée comme facultative, car le RI n'était pas réellement nécessaire au fonctionnement du CE, et car aucun texte ne sanctionnait son absence. Le législateur ne prévoit toujours pas de sanctions à défaut de RI, mais il " confie " au RI le rôle d'encadrer la réalisation de certaines obligations comptables. Celui-ci doit en effet fixer les modalités :

    - d'arrêté des comptes (L2325-49 CT) ;

    - d'établissement du rapport d'activité et de gestion (L2325-50 CT) ;

    - de fonctionnement de la commission des marchés (L2325-34-2 CT).

    Il semble donc désormais incontournable d'adopter un règlement intérieur.

    ...ainsi qu'un formalisme de gestion renforcé

    Le comité central d'entreprise (CCE), auquel les obligations comptables seront également applicables, pourra comme auparavant se voir confier la gestion d'activités sociales et culturelles (ASC) par les comités d'établissement. Il lui faudra désormais formaliser strictement cette délégation, par une convention de transfert de gestion entre les comités d'établissement et le CCE (L2327-16 al 4. CT). Cette obligation entrera en vigueur, non pas au 1er janvier 2015 comme l'essentiel des dispositions de la réforme, mais dès la parution du décret d'application de cette mesure, qui définira les clauses obligatoires de cette convention. Selon le document de synthèse du groupe de travail piloté par la DGT, la convention de gestion devra définir au minimum :

    - les ASC dont la gestion est transférée ;

    - les modalités de transfert de gestion (moyens humains et financiers) ;

    - les obligations respectives des contractants ;

    - la durée de la convention (qui ne peut être supérieure à la durée des mandats des membres du CE).

    Des documents comptables plus riches...

    Outre la tenue d'une comptabilité détaillée (cf. publication du 20.6.2014), le CE devra établir en fin d'exercice un rapport d'activité et de gestion, présentant " des informations qualitatives sur ses activités et sur sa gestion financière, de nature à éclairer l'analyse des comptes par les membres élus du CE et les salariés de l'entreprise " (L2325-50). Ce rapport a vocation à se substituer au compte rendu annuel actuellement en vigueur (R2323?37 CT). Un décret est attendu pour le supprimer, et fixer les informations que contiendra ce nouveau rapport. Son contenu, beaucoup plus substantiel (rapport AN), variera en fonction de la taille du CE.

    Pour les " petits " CE, le bilan financier de l'année consistera à donner des explications qualitatives sur l'état de synthèse des dépenses et des recettes, l'état patrimonial et d'éventuelles données complémentaires. Il devra fournir des informations sur les transactions significatives effectuées - celles-ci figurant en annexe des comptes des " moyens " et " gros " CE (L2325-47 CT).

    ...et mieux contrôlés

    En fin d'exercice, les comptes seront arrêtés par les membres élus du CE (selon des modalités fixées par son règlement intérieur). Ni l'employeur, ni les représentants syndicaux ne participeront à cette opération. Les comptes arrêtés et le rapport d'activité et de gestion seront communiqués par les membres du CE chargés de ces formalités aux autres membres du CE au moins trois jours avant leur approbation (L2325-52 CT). Un commissaire aux comptes devra certifier les comptes des " gros " CE (L2325-54 CT) tandis qu'un expert comptable sera tenu de présenter les comptes des CE " moyens ", en séance, aux frais du CE (L2325-57 CT).

    Les comptes seront approuvés par les membres élus du CE au cours d'une réunion portant sur ce seul sujet, et fera l'objet d'un procès verbal spécifique (L2325-49 CT). C'est également au cours de cette séance que le rapport d'activité et de gestion sera présenté aux membres du CE (L2325-50 CT), ainsi que le rapport sur les conventions passées entre le CE et l'un de ses membres (L2325-51 CT).

    Une comptabilité plus transparente au profit des salariés

    Une fois les différents documents comptables élaborés (comptes annuels et rapport d'activité et de gestion), ils devront être communiqués aux salariés " par tous moyens " (L2325-53 CT). Actuellement le CE doit afficher son compte rendu annuel de gestion sur les panneaux réservés aux communications syndicales (R2323?37 CT). Seuls les salariés sont destinataires de ces informations : les organisations syndicales à l'initiative du projet de loi n'ont pas souhaité imposer une publicité plus large de la comptabilité du CE. Les comptes annuels et les pièces justificatives qui s'y rapportent devront être conservés pendant 10 ans (L2325-56 CT).

    Les textes ne prévoient pas de sanction dans l'hypothèse d'un non respect de ces nouvelles obligations. Le CE a toutefois tout intérêt à mettre en place une comptabilité conforme aux textes, afin d'être exempt de toute suspicion de la part des salariés, et de conserver un bon climat social. Par ailleurs, à défaut, n'y aurait-il pas entrave au fonctionnement du CE ?

    200 experts pour répondre à vos besoins