Succession : la renonciation du légataire et le sort des biens objets du legs
, Christine Olivier-caillat
, Sydney Azoulay
, Jean-pierre Goncalves
La question du sort des biens légués en cas de renonciation du légataire au legs dont il a été gratifié est primordiale eu égard au règlement d'une succession. Le notaire, acteur principal du règlement successoral va jouer un rôle capital en la matière, l'interprétation du testament lui incombant.
Le testament a pour effet de déroger aux règles de dévolution légale, soit en gratifiant une personne n'étant pas héritière ab intestat, soit en aménageant les droits d'un héritier ab intestat. Cela signifie en réalité qu'en l'absence de testament, la succession se règle intégralement en fonction des règles de dévolution légale, et qu'à contrario, en présence d'un testament, la succession se règle à la fois en fonction des dispositions testamentaires et en fonction des règles légales.
Le légataire, qu'il soit universel, à titre universel ou à titre particulier, a toujours le choix d'accepter ou de refuser le legs dont il a été gratifié. Lorsqu'il résulte du testament ou de son interprétation, que le testateur a seulement entendu donner la préférence à son légataire, en cas de renonciation au legs, les héritiers légaux recueillent les biens dont il en faisait l'objet, comme si le défunt était décédé sans testament (Cass. 1re civ., 12 juill. 1960). En effet, la dérogation à la dévolution légale résultant du testament n'a plus lieu d'être puisque le legs ne s'exercera pas.
Les biens objets du legs reviennent à l'Etat
Cependant, lorsqu'il résulte du testament ou de son interprétation que le disposant a voulu, outre gratifier son légataire, exhéréder ses héritiers légaux, dans ce cas, en cas de renonciation au legs, les biens objets dudit legs reviendront à l'État, qu'il n'est pas possible d'exclure compte tenu des dispositions de l'article 724 du Code civil (Cass. req., 10 nov. 1906).
Toutefois, si le testament prévoit une exhérédation de seulement certains héritiers légaux, en cas de renonciation au legs les biens objets de ce dernier reviendront aux héritiers légaux non explicitement écartés.
Il faut donc rechercher si le testateur a voulu simplement gratifier le légataire, lui donner une simple préférence, ou si au-delà de cette simple volonté il a souhaité exclure ses héritiers légaux. Evidemment, cette interprétation incombera au notaire chargé du règlement successoral et, en cas de litige, relèvera du pouvoir souverain des juges du fond.