Taxe de séjour : quelles précautions avant de délibérer d'ici juillet ?
, Shathana Santhalingam
, Robert Giovannelli
, Christine Olivier-caillat
La taxe de séjour est destinée à donner les moyens aux collectivités locales de développer leur politique touristique. Après une année de crise sans précédent dans le secteur, les collectivités devront cette année délibérer avant le 1er juillet (contre le 1er octobre jusqu'ici) si elles souhaitent modifier les conditions d'application de cette taxe : en matière de régime (au réel / au forfait), de tarifs, ou encore de période de perception. En plus de ce calendrier modifié, différentes évolutions législatives doivent être regardées avec la plus grande attention. Tour d'horizon.
Taxe de séjour : quels changements introduits par la Loi de finances pour 2021 ?
Les articles 122, 123 et 124 de la Loi de finances pour 2021 (LFI 2021) modifient les dispositions du Code général des collectivités territoriales (articles L.2333-26 et suivants) en matière de taxe de séjour.
Premièrement, la LFI pour 2021 introduit une modification en matière de taxe de séjour au forfait. Jusqu'ici, les collectivités concernées par ce régime devaient voter un abattement compris entre 10 % et 50 % afin de tenir compte de la fréquentation des hébergements. Désormais, il sera possible de voter un abattement allant jusqu'à 80 %.
En outre, la date de délibération est avancée du 1er octobre au 1er juillet. Cette modification est applicable dès 2021 en dépit d'un amendement du Sénat visant à décaler l'entrée en vigueur de la mesure d'un an.
Enfin, la Loi de finances modifie le plafonnement des hébergements non classés ou en attente de classement. Rappelons que les communes et les EPCI compétents sont tenus de voter un taux compris entre 1 % et 5 % du coût de la nuitée pour les hébergements non classés ou en attente de classement. Le tarif obtenu était plafonné au plus faible des deux tarifs suivants :
- Soit le tarif le plus élevé voté par la collectivité ;
- Soit le tarif plafond applicable aux hôtels de tourisme 4 étoiles, c'est-à-dire 2,30€ la nuitée.
En d'autres termes, quoi qu'il arrive, le tarif maximal applicable aux hébergements non classés ne pouvait dépasser 2,30€ la nuitée. Désormais, si la collectivité a adopté un tarif maximal applicable aux hébergements classés supérieur à 2,30 €, c'est celui-ci qui constituera le plafond. Dans les faits, le tarif maximal qui pourra s'appliquer sera de 4,20 € par personne et par nuitée, soit le tarif applicable aux palaces. Cette modification s'applique dès 2021, sans qu'il n'y ait besoin de délibérer.
Taxe de séjour en 2021 : comment gérer les effets de la crise du tourisme ?
Compte-tenu des effets de la crise économique, de nombreuses collectivités reçoivent aujourd'hui des demandes de professionnels du tourisme sollicitant une exonération de la taxe de séjour. La 3ème Loi de finances rectificative pour 2020 a autorisé les collectivités locales à prendre une délibération dans le courant de l'été visant à exonérer de taxe de séjour les redevables au titre de l'année dernière. Il s'agissait d'une exonération totale pour la taxe de séjour au forfait (qui prévoyait même un remboursement des sommes déjà acquittées par les contribuables), et d'une exonération partielle (du 6 juillet au 31 décembre) pour la taxe de séjour au réel.
Aucun texte ne prévoit de reconduire pour 2021 les dispositifs exceptionnels de la 3ème Loi de finances rectificative de 2020. Si la taxe de séjour au réel est payée par le touriste et ne constitue donc pas, à proprement parler, une "dépense" pour l'hôtelier, il n'en est pas de même pour la taxe de séjour au forfait, qui a contrario est acquittée par ce dernier.
Ainsi que le rappelle la DGCL dans son guide pratique actualisé en juin 2020, la taxe de séjour au forfait n'est due qu'au cours de la période d'ouverture de l'établissement comprise dans la période de perception décidée par la collectivité. Une fermeture qui n'aurait pas été connue au moment de la déclaration peut ainsi faire l'objet d'une correction, soit directement par la collectivité perceptrice, soit par l'hébergeur lui-même. En outre, tout hébergeur est en droit d'exiger un remboursement, même partiel, de sa taxe de séjour en cas de fermeture de son établissement et s'il a déjà réglé la somme due, grâce à la procédure décrite à l'article R.2333-47 du Code général des collectivités territoriales.
Taxe de séjour en 2021 : quels sont les autres points d'attention ?
La taxe de séjour verra son barème inchangé en 2022 par rapport à 2021. Il convient ici de rappeler que si deux catégories d'hébergement peuvent être assujetties à deux régimes différents de la taxe (par exemple les hôtels à la taxe de séjour au réel et les campings à la taxe de séjour au forfait), il est interdit de voter des tarifs différents pour des types d'hébergements différents mais de même standing (par exemple un tarif différent entre un hôtel de tourisme deux étoiles et un meublé de tourisme deux étoiles).
Par ailleurs, il convient d'être vigilant au sujet de l'application de l'article 16 de la Loi "Engagement et proximité". Cet article offre aux communes érigées en stations classées de tourisme ou en communes touristiques la possibilité de conserver ou de récupérer la compétence "promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme". Cette faculté n'emporte aucune conséquence sur la taxe de séjour si elle est déjà perçue par l'EPCI. La commune récupère ainsi la compétence…sans la taxe ! Une seule exception concerne le cas particulier des offices de tourisme créés en EPIC. Ainsi, si la commune décide de créer un office de tourisme communal sous forme d'EPIC, indique la Préfecture des Côtes d'Armor, alors le produit de la taxe de séjour collecté sur son territoire (et perçu par l'EPCI) devra revenir à l'office de tourisme communal en application des dispositions de l'article L.133-7 du code du tourisme.
Enfin, précisons que la procédure de taxation d'office a été grandement simplifiée depuis un décret d'octobre 2019. Si cette procédure a été, contexte oblige, peu mise en œuvre en 2020, il est intéressant d'en retenir que désormais, l'avis de taxation d'office ne devra plus obligatoirement reposer sur l'occupation réelle de l'hébergement, mais que l'assiette d'imposition pourra être estimée à partir des informations à disposition du Maire ou du Président de l'EPCI (annonces publiées, déclarations antérieures, etc).
Ainsi, le calendrier avancé cette année en matière de taxe de séjour doit inciter les collectivités à se pencher dès maintenant sur leur délibération.
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