Vers une simplification de l'épargne retraite
La loi PACTE, " plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises " a été adoptée par l'Assemblée nationale le 11 avril. Elle fait l'objet d'un recours devant le Conseil constitutionnel et n'est donc pas entrée en vigueur à ce jour.
Observant que les dispositifs actuels de retraite supplémentaire sont disparates, complexes et qu'ils se caractérisent par des règles différentes en matière notamment d'alimentation, de régime social et fiscal, la loi PACTE réforme en substance le 3ème pilier de la retraite, auquel nous consacrons ce focus.
UN CORPUS DE RÈGLES UNIQUES
Afin de favoriser une meilleure lisibilité de l'épargne retraite, le gouvernement a souhaité supprimer tous les dispositifs d'épargne retraite existants, afin de créer un nouvel outil harmonisé : le PER.
Le PER est défini, par le législateur, comme un plan ayant pour objet : " l'acquisition et la jouissance de droits viagers personnels ou le versement d'un capital, payables au titulaire à compter, au plus tôt, de la date de liquidation de sa pension ".
Le PER pourrait être mis en place techniquement via l'ouverture d'un compte titres, ou via l'adhésion à un contrat d'assurance groupe.
Ce nouvel outil regroupe les dispositifs actuels de retraite supplémentaire (PERCO, régimes de retraite à cotisations définies dits " article 83 ", contrats Madelin, PERP, Prefon…) afin d'harmoniser le régime de l'épargne retraite au sein d'un socle juridique unique.
Il est composé de deux catégories de produits : des contrats individuels et des contrats collectifs. Dans les contrats collectifs, on retrouve un contrat catégoriel, équivalent de l'actuel article 83, et un contrat universel, équivalent de l'actuel PERCO.
COMPOSITION ET GESTION
Tout comme les plans existants à ce jour, le PER reste le réceptacle de l'intéressement et de la participation. Il peut également être alimenté par des versements volontaires du salarié, des sommes issues d'un compte épargne temps (CET) ou encore des versements de l'employeur.
LIQUIDATION DES SOMMES
En principe, les sommes placées sur le plan ont vocation à être bloquées, permettant ainsi au titulaire de se constituer une épargne au moment du départ en retraite.
Par exception, des cas de déblocages anticipés sont mis en œuvre, l'Assemblée nationale ayant retenu les cas de déblocage anticipés de l'actuel PERCO. Les sénateurs avaient proposé de les compléter par la possibilité de financer des travaux d'adaptation de la résidence principale à la perte d'autonomie, ce qui a été refusé par l'Assemblée nationale pour des raisons économiques. En effet, les assureurs mettent actuellement en place des produits couvrant le risque dépendance, qu'ils souhaitent continuer à développer sur le marché.
Les cas de sortie par anticipation retenus sont donc les suivants :
• Le décès du conjoint du titulaire ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ;
• L'invalidité du titulaire, de ses enfants, de son conjoint ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ;
• La situation de surendettement du titulaire ;
• L'expiration des droits à l'assurance chômage du titulaire, ou le fait pour le titulaire d'un plan qui a exercé des fonctions d'administrateur, de membre du directoire ou de membre du conseil de surveillance et n'a pas liquidé sa pension dans un régime obligatoire d'assurance vieillesse de ne pas être titulaire d'un contrat de travail ou d'un mandat social depuis deux ans au moins à compter du non-renouvellement de son mandat social ou de sa révocation ;
• La cessation d'activité non salariée du titulaire à la suite d'un jugement de liquidation judiciaire en application du titre IV du livre VI du code de commerce ou toute situation justifiant ce retrait ou ce rachat selon le président du tribunal de commerce auprès duquel est instituée une procédure de conciliation mentionnée à l'article L. 611-4 du même code, qui en effectue la demande avec l'accord du titulaire ;
• L'affectation des sommes épargnées à l'acquisition de la résidence principale.
DES MODALITÉS DE SORTIE CHOISIES
Toujours dans l'optique de rendre l'épargne retraite attractive, les titulaires du plan ont désormais le choix, au moment du départ en retraite, de bénéficier d'un capital, libéré en une fois ou de manière fractionnée, ou d'une rente viagère.
UNE TRANSPORTABILITÉ TOTALE
Le gouvernement est parti du constat suivant : lorsqu'on quitte une entreprise, les avoirs détenus dans un PEE ou un PERCO peuvent être transférés, sous réserve que le nouvel employeur dispose de ces plans. Des difficultés concrètes existent si le nouvel employeur n'en dispose pas.
Une " portabilité " permettant une meilleure fluidité des sommes placées, et ce malgré les aléas de carrière a donc été mise en place.
Désormais, l'article 20 prévoit que les droits individuels en cours de constitution sont transférables vers tout autre PER. Le transfert des droits n'emporte pas modification des conditions de leur rachat ou de leur liquidation.
Le montant des frais est encadré : aucun frais à l'issue d'une période de 5 ans à compter du premier versement dans le plan, et 1 % des droits acquis dans le cas contraire.
En revanche, une limite subsiste : les droits individuels sont transférables uniquement lorsque le titulaire du plan n'est plus tenu d'y adhérer.
BAISSE DU FORFAIT SOCIAL
Afin d'inciter le développement de l'épargne retraite, le forfait social est généralisé à 16% pour les droits venant alimenter le PER. Reste que pour que ce taux soit applicable, il faut qu'au moins 10% des actifs soient investis pour le financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire.
UNE INFORMATION RENFORCÉE
Pour que les titulaires d'un PER puissent gérer au mieux leur plan, le législateur prévoit une information régulière sur leurs droits, dans des conditions qui seront fixées par voie règlementaire.
Cette information doit comporter des éléments relatifs à la performance brute de frais, la performance nette de frais ainsi que le montant des frais prélevés.
REMISE EN CAUSE DES RETRAITES CHAPEAU
La loi PACTE habilite le gouvernement à transposer les dispositions de la directive 2014/50/UE dite " portabilité " dans un délai de six mois suivant sa promulgation, l'avenir des retraites chapeaux - dits contrats article 39 - est donc incertain.
En droit français, le bénéfice d'un régime de retraite à prestations définies est conditionné au fait que le salarié termine sa carrière dans l'entreprise. Il s'agit donc d'un frein à la mobilité d'après le Parlement européen.